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La caution ne peut se prévaloir du dol du débiteur principal

Le contentieux lié aux actes de cautionnement est nombreux et un récent arrêt rendu par la Haute juridiction est venu alimenter les débats doctrinaux.

C'est sur le plan des exceptions opposables par la caution à l'égard du créancier que la Cour de cassation a eu l'occasion d'entériner un courant jurisprudentiel récent.

Rappelons que l'article 2313 du Code civil prévoit le régime des exceptions opposables par la caution à l'égard du créancier :

  • les exceptions inhérentes à la dette du débiteur principal qui sont opposables par la caution,
  • les exceptions purement personnelles du débiteur principal inopposables par la caution.

Au terme de son arrêt du 27 janvier 2021 (n°18-22.541) la Cour de cassation restreint le domaine des exceptions inhérentes à la dette écartant de son champ d'application le dol subit par le débiteur principal. 

EN FAIT

Une cession de fonds de commerce est régularisée entre deux sociétés dont le paiement du prix de cession est échelonné sur 84 mensualités. Les engagements du Cessionnaire sont garantis par une caution solidaire.

Suite à la défaillance de ce dernier, le Cédant fait inscrire une hypothèque sur le bien immobilier appartenant à la caution.

Le Cédant et le Cessionnaire sont placés en liquidation judiciaire.

Le liquidateur judiciaire du Cédant déclare sa créance au passif du Cessionnaire et fait délivrer un commandement de payer à la caution valant saisie immobilière. 

La caution oppose l'exception de nullité en raison du dol ayant vicié le consentement du débiteur principal à l'acte de vente du fonds de commerce. 

Les juges du fond rejettent les prétentions de la caution. Cette dernière forme un pourvoi devant la Cour de cassation. 

Le dol affectant le contrat principal peut-il être considéré comme une exception inhérente à la dette opposable par la caution ? 

EN DROIT

La Cour de cassation est amenée à trancher un débat jurisprudentiel de longue date, certaines décisions qualifiant le dol d'exception inhérente à la dette (Civ. 3ème, 11 mai 2005, n°03-17.682) d'autres en tant qu'exception purement personnelle (Mixte 8 juin 2007, 03-15.602 ; Com. 22 mai 2013, n°11-20.398).

Suivant ce dernier courant jurisprudentiel, la Cour de cassation confirme, au visa de l'article 2313 du Code civil, que le dol est une exception purement personnelle du débiteur principal ne pouvant être opposée par la caution au créancier.

La caution était donc irrecevable à agir en nullité du contrat principal en raison du dol affectant le consentement du Cessionnaire qui, lui seul, pouvait solliciter son annulation. 

Cette décision apparait juridiquement fondée au regard de trois grands principes gouvernant le droit des contrats :

  • le caractère accessoire de l'engagement de caution, 
  • l'effet relatif attaché aux contrats,
  • la nullité relative liée aux vices du consentement.

Le contrat de cautionnement est conclu entre le créancier et la caution, le débiteur principal reste donc tiers à ce contrat. Le dol qui emporterait vice du consentement du débiteur principal ne peut concerner le consentement donné par la caution au profit du créancier.

Malgré l'autonomie entre ces contrats, cette décision apparait critiquable.

En effet, le cautionnement reste une relation tripartite : la caution s'engage en considération des relations contractuelles entre le débiteur principal et le créancier.

La caution peut donc être indirectement victime des manoeuvres dolosives du créancier à l'égard du débiteur principal sur la réalité de la dette à garantir, manoeuvres qui ont conduit la caution à donner son consentement.

A ce titre, la caution devrait pouvoir bénéficier d'une protection supplémentaire au titre des exceptions inhérentes à la dette au titre du dol, ce que la Cour de cassation refuse.

Toutefois, deux réserves doivent être apportées à cette critique.

La première, rappelée par la Cour de cassation, est que la caution garde la possibilité de contester la validité de son engagement le fondement du dol.

La seconde est que la caution dispose d'un recours subrogatoire à l'encontre du débiteur en cas d'absence d'annulation du contrat principal et, le cas échéant, garde un recours personnel.

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