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L'inopposabilité de la DNI publiée postérieurement au jugement d'ouverture d'une procédure collective

L'ouverture d'une procédure collective gèle le patrimoine du débiteur qui constitue le gage commun des créanciers.

S'agissant des biens immeubles du débiteur, la loi Macron du 6 août 2015 a modifié l'article L. 526-1 du Code de commerce faisant échapper au gage commun des créanciers la résidence principale débiteur.

Ce même article permet au débiteur de déclarer insaisissable tout immeuble non affecté à l'activité professionnelle. La déclaration notariée d'insaisissabilité (DNI) est opposable uniquement aux créanciers professionnels dont les droits naissent postérieurement à sa publicité. 

Ainsi, les créanciers professionnels et non-professionnels dont les droits naissent antérieurement à la publication ainsi que les créanciers non-professionnels postérieurs à cette date, peuvent poursuivre la réalisation de l'immeuble.

Dans une récente affaire, la Cour de cassation a été saisie d'une question relative à la régularité et l'opposabilité d'une DNI déposée et publiée par un débiteur durant sa procédure de sauvegarde (Com. 10 mars 2021, n°19-21.971).

EN FAIT

Un débiteur bénéficie d'une procédure de sauvegarde dans laquelle un administrateur judiciaire est désigné. Le débiteur procède au dépôt et à la publicité d'une déclaration notariée d'insaisissabilité visant deux immeubles durant la période d'observation. 

La sauvegarde est convertie en redressement puis en liquidation judiciaire. Le liquidateur désigné par le tribunal entend réaliser les immeubles du débiteur et se voit opposer la DNI régularisée par le débiteur.

Les juges du fond considèrent que la DNI est opposable au liquidateur dans la mesure où la procédure de sauvegarde n'enlève pas les pouvoirs de gestion et d'administration du débiteur qui peut, dès lors, agir seul. 

Le liquidateur se pourvoi en cassation.

La DNI régularisée et publiée postérieurement à une procédure de sauvegarde est-elle opposable au mandataire judiciaire ? 

EN DROIT

Au visa de l'article L. 526-1 du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 4 août 2008, la Cour de cassation casse l'arrêt de la Cour d'appel énonçant la règle suivante :

  • l'insaisissabilité est inopposable au liquidateur judiciaire dès lors que la publication avait été accomplie postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde.

La Haute juridiction ne répond pas aux arguments tirés de la régularité de la DNI durant la période d'observation du débiteur mais uniquement sur la date de publicité ce celle-ci.

Cette question était pourtant légitime au regard des faits d'espèce car la date de cessation des paiements avait été fixée au jour du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde. La DNI avait donc été déposée durant la période suspecte.

Rappelons que l'ordonnance du 12 mars 2014 a introduit à l'article L. 632-1 I 12° du Code de commerce un cas de nullité de droit à l'encontre de la DNI régularisée en période suspecte. Toutefois, ces dispositions n'étaient applicables qu'à compter du 1er juillet 2014, écartant son application au cas d'espèce. 

La solution doit être approuvée, seule publicité de la DNI rend cette dernière opposable aux tiers et donc aux organes de la procédure collective.

Il est toutefois malheureux que cette décision n'apporte aucune précision sur l'éventuelle autorisation du Juge-Commissaire (L. 622-7 II du Code de commerce) ou le contreseing de l'Administrateur judiciaire concernant le dépôt de la DNI par le débiteur durant la période d'observation.

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